Pascal Dorseuil : Champion du Monde Motocross Vétérans

Publié par Stéphan Legrand le mardi 4 novembre 2025 à 05:35

Pascal Dorseuil, 50 ans, est devenu Champion du Monde Motocross Vétérans à Glen Helen le week-end dernier. Le pilote réunionnais vit un rêve debout. Il vous raconte.

LeBigUSA: Ca fait quoi de venir de La Réunion et de repartir de Californie avec un titre de Champion du Monde Motocross Vétéran ?
Pascal Dorseuil : « C’est juste impressionnant. Je n’arrive pas encore à réaliser. Je suis parti de la Réunion avec la simple idée de participer à cette course de vétérans sur le circuit mythique de Glen Helen. Je rentre chez moi avec un titre de Champion du Monde. Je suis toujours complètement perché. J’ai l’impression de vivre à l’époque de JMB. Depuis gamin, j’ai toujours aimé le bruit des motos. Pas n’importe lesquelles : les motos de cross. Je faisais 15 kilomètres aller-retour en BMX juste pour aller voir rouler des gars que je ne connaissais même pas. Petit à petit, j’ai fait connaissance avec eux. Un lien s’est créé entre nous. Je commençais à toucher leurs motos, à graisser la chaîne, à bricoler un peu, dans l’espoir de pouvoir juste m’asseoir dessus. Petit à petit, j’ai gagné leur confiance. On a échangé : je lavais, je faisais de la mécanique. Ils me montraient comment passer les vitesses. Je pense à eux plus que jamais. »

Tu t’imposes devant Kurt Nicoll et Mike Coter, t’y attendais-tu ou est-ce une surprise même pour toi ?
« C’est totalement une surprise. Quand j’étais môme, dans ma chambre, j’avais des posters de Kurt Nicoll. Je me suis battu contre lui pour gagner ce titre. C’est juste un truc de fou. C’est sa 4ème participation, je savais qu’il était venu pour s’imposer mais quand j’ai vu que j’avais la vitesse et le potentiel pour gagner, je ne me suis plus posé de questions. J’avais vraiment envie de réussir. Pour la petite histoire, Mike Coter a loué sa moto au même endroit que moi. Du coup, on avait tissé des liens d’amitiés avant la course. » 

Quand tu décides de venir rouler à Glen Helen, quel est ton objectif : participer, te faire plaisir ou vraiment viser la victoire ?
« J’ai fêté mes 50 ans cette année et je me suis dit que je devais arrêter de m’interdire des rêves inaccessibles. Après mes deux titres de Champion de France de 2021 et 2023, je voulais passer un cap. Mon envie était de participer à une course aux États-Unis, d’être derrière une grille de départ là-bas. Je m’entraîne, je m’entretiens, j’ai mon petit niveau alors je me suis dit : je fonce. J’ai décroché mon 21ème titre de Champion MX 450 de la Réunion. Ça peut paraître dérisoire, mais chacun a une saveur particulière. J’ai senti que 2025 me souriait. J’ai mis le doigt sur Glen Helen, sans prétention, mais avec l’envie de donner le meilleur de moi-même. Je veux absolument y aller. Il me fallait juste une moto et un budget… »

Justement, d’un point de vue logistique, ça n’a pas dû être simple de venir de si loin avec la moto, le matériel, etc., comment t’es-tu organisé ?
« Avec ma femme, on a commencé par acheter les billets d’avion. On n’avait alors plus moyen de reculer. Ensuite, il fallait trouver une moto : cela n’a pas été simple. Je roule à la Réunion sur une KTM 450 SX-F depuis 2019. Je n’en ai pas trouvé en Californie ou alors elle était hors de prix. C’était la croix et la bannière. Finalement, j’ai trouvé mon bonheur chez MX Vacation à Lake Elsinore. Je n’avais encore jamais posé mes fesses de ma vie sur une Yamaha YZF 450. Elle était complètement d’origine. J’ai pris des clapets et de quoi régler la fourche et l’amortisseur. C’est tout. J’ai eu la chance d’avoir des partenaires financiers et des amis. J’ai même fait une série de tee-shirts pour récolter un peu d’argent. Ce n’est que du bonheur avec de la débrouille de A à Z. »

Le circuit de Glen Helen est réputé pour ses montées impressionnantes et sa terre piégeuse, comment as-tu fait pour t’imposer ? 
« Je suis venu pour prendre du plaisir avant tout. Chez moi, on a des circuits qui font 1 minute 30 au tour et ce n’est pas large du tout. Dans les montées de Glen Helen, il y a trois lignes. On dirait une autoroute. Les descentes sont à te couper le souffle mais au final ce n’est que du bonheur. J’ai eu un peu de pression quand j’ai compris ce que je pouvais réaliser. Jeudi, quand j’ai découvert la piste , j’étais impressionné par la vitesse des mecs. Vendredi matin, je me suis inscris en 40 ans Pro : je fais 7 et 5ème. J’étais agréablement surpris. Devant, ça roulait fort mais j’ai commencé à me sentir plus détendu, à prendre vraiment du plaisir. L’après-midi, je gagne la coure 50 ans Expert. Je ressens encore plus de confiance. Le lendemain, l’épreuve 50 ans Pro ne plaisante pas. Les noms me font trembler mais sur la grille de départ, je ne regarde ni à gauche ni à droite. Je gagne alors la 1ère manche devant Kurt qui n’est alors pas loin derrière. Je rentre au stand. Je comprends que j’ai un pied dedans. La pression monte mais je veux rester dans le plaisir. Le lendemain, les regards changent. Beaucoup de félicitations, d’encouragements. Les gens me disent qu’ils aiment mon pilotage. Je n’en reviens pas : moi, un petit gars des îles, qui fait vibrer les américains. Puis je gagne à nouveau. Je suis Champion du Monde. Un truc de malade. » 

À 50 ans, qu’est-ce qui te donne encore l’envie de te mettre derrière une grille de départ ?
« C’est la passion qui fait vivre les plus beaux moments de la vie à 50 ans et plus. S’il me restait un peu moins d’années devant moi, je la croquerais encore plus fort, à fond, sur une moto de cross. Il n’y a pas d’âge : quand il y a l’envie et la passion, tout le reste s’efface. »

Tu représentes La Réunion et la France sur une épreuve mondiale, ressens-tu une forme de fierté ou de responsabilité particulière ?
« Bien sûr que c’est une fierté de représenter mon ile. C’est aussi une pression de représenter la France. Mon île est en feu pour moi. J’ai l’impression que le volcan est en éruption. Les médias, les réseaux sociaux, etc. tout va si vite que j’en perds pied. Je suis ému, je pleure sans arrêt. Je suis venu au pied de l’Himalaya avec des claquettes et je suis arrivé au sommet. Chez nous, un pur Réunionnais des Hauts, on appelle ça un « petit Yab ». Alors moi, un « p’tit Yab » Champion du Monde aux États-Unis, c’est juste impensable. Je suis fier de mon parcours, fier de représenter mon île, la France, ma famille et mes amis. Mille mercis à tous. »

Si tu devais donner un conseil à un pilote de 40 ou 50 ans qui hésite encore à reprendre le guidon, tu lui dirais quoi ?
« Si la santé et l’envie sont là, je ne vois pas ce qui peut empêcher un passionné de cross en bonne santé de rouler et se faire plaisir. A Glen Helen, j’avais les yeux qui brillaient de voir des mecs de 80 ans sur la grille de départ. J’ai même accompagné un bulgare de 76 ans pour lui préparer sa trace. Il lui fallait presque un déambulateur pour arriver vers sa moto. Je le répète, il n’y pas d’âge, il faut se lancer. »

Après ce titre, tu arrêtes au sommet ou tu remets le couvert l’année prochaine ?
« Champion du Monde… j’ai encore du mal à y croire. Je ne suis pas encore redescendu. Une chose est sûre : je ne peux pas m’arrêter là. Après une si belle aventure, pleine d’émotions, Glen Helen m’a marqué, l’Amérique m’a fait pleurer. J’ai donné rendez-vous à Kurt et Mike pour l’année prochaine. Je rentre sur mon île avec des trophées et des souvenirs plein la tête. Je suis un « Yab » heureux. »

Propos recueillis par Stéphan Legrand (pour LeBigUSA).

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