Claude Membrez : « une décision inéluctable »

Publié par Justine Geisler le mercredi 29 juillet 2020 à 14:47

Claude Membrez est le directeur général du Palexpo où se déroule chaque année le Supercross de Genève. Il revient avec nous sur l’annulation de l’édition 2020.

LeBigUSA.com : Cette décision d’annuler le SX de Genève est tombée assez tôt, dès le début du mois de juillet. Était-elle inéluctable ?
Claude Membrez : A nos yeux, elle l’est en effet. Pour revenir un peu sur les événements et sur cette crise sanitaire, il faut savoir qu’on a figuré parmi les premiers à être heurtés par les difficultés. On a dû annuler le salon de l’auto le 28 février dernier alors qu’il était monté dans nos locaux. A ce moment là, le salon de l’agriculture battait son plein à Paris. Je me souviens de l’appel de mon collègue de Viparis, se demandant pourquoi cette annulation. Je lui avais alors répondu que la même chose lui arriverait sans doute bientôt, qu’il serait contraint de mettre en pause ses activités. Il ne m’a pas cru tout de suite tout comme mes autres collègues dans d’autres villes européennes. Finalement, quelques jours plus tard, le salon de l’agriculture fermait ses portes plus tôt. Salons, concerts, festivals… tout est tombé à l’eau comme chacun le sait. Très vite, on a compris qu’il serait extrêmement difficile de repartir dans l’organisation d’événements de masse cette année, y compris le Supercross de Genève. Il est impossible sur un tel événement, avec du public dans les gradins, de respecter et faire respecter les normes de sécurité. Certains diront peut-être qu’on a pris la décision trop vite mais objectivement, jamais on ne pourra vivre cet année 2020 comme on l’avait prévu avec notre calendrier habituel. Il y a des événements qui ne peuvent pas, ne pourront pas avoir lieu. Etant donné la typologie de l’événement, le SX en fait partie.

Comment l’annonce a-t-elle été acceptée par les participants mais également les partenaires de l’événement ? Les gens l’ont-ils compris ?
Je crois qu’on est tous dans le désarroi et dans l’expectative en même temps. On vit tous cette crise sanitaire pour la 1ère fois et on est tous surpris par son ampleur et ses conséquences. On est un peu désarmés par rapport au chemin que l’on doit emprunter par la suite. On doit accepter que les choses seront différentes demain, conçues différemment également. On parle de Supercross mais pensez aux compagnies aériennes, aux plages, aux vacances à l’autre bout du Monde… aujourd’hui, c’est impossible et qui l’aurait cru il y a 6 mois ? Les partenaires du SX de Genève comprennent que les mesures sanitaires en vigueur ne permettent pas son organisation. Ils sont tristes et déçus mais on est obligés d’accepter ce qu’il nous arrive avant de rebondir. Aujourd’hui, on se pose 100 000 questions sans avoir les réponses.

Cette annulation a-t-elle un impact sur la pérennité du SX de Genève et notamment l’édition 2021 ?
C’est beaucoup trop tôt pour en parler et répondre à cette question. Que se passera-t-il en 2021 ? Encore une fois, souvenez-vous il y a 6 mois. Pouviez-vous imaginer ce qui allait arriver ? Evidemment, on souhaite que les choses repartent à la normale mais nous n’avons aucune certitude quant à la suite.

Cette décision d’annuler si tôt vous a-t-elle permis d’éviter une éventuelle catastrophe financière ?
Oui. Clairement, plus on attend pour annuler ou reporter un événement, plus on a de frais engagés. C’est justement pour éviter cette catastrophe qu’on a du prendre cette décision vite. On aurait pu attendre encore et décider fin août mais à ce moment là, on aurait déjà engagé des dépenses concernant les pilotes, les gradins et bien d’autres types de prestation liées à cet événement. Bien sûr, on a déjà quelques frais mais ça n’a rien de catastrophique.

On voit d’autres événements comme le SX de Paris qui sont pour le moment maintenus. Encore une fois, c’est la carte de la raison qui l’a emporté pour vous très rapidement ?
C’est ça. On ne voulait pas risquer ensuite d’agir précipitamment. Chacun prend ses décisions selon ses propres convictions. L’organisation du SX de Paris est sans doute un peu différente de la notre. Nous concernant, le SX est adossé au concours hippique de Genève et ils avaient besoin d’avoir des réponses claires très vite. Ils voulaient pouvoir s’organiser de leur côté. Au 30 juin, il fallait donner une réponse définitive, pas un « peut-être ». Il a fallu trancher.

Outre le SX de Genève, il y a bien évidemment un certain nombres d’autres événements et de salons organisés au Palexpo. Certains ont-ils été maintenus ?
Depuis le 28 février, tous les événements ont été annulés les uns derrière les autres. On a démonté le salon de l’auto puis on a mis tout le monde au chômage. Depuis, chacun attend une reprise de l’activité. J’ai vu la décision prise par la France de rouvrir les foires et salons au 1er septembre ce qui est une excellente nouvelle. J’espère qu’elle se répercutera maintenant en Suisse. La Hollande a elle aussi pris cette décision il y a quelques semaines. En Belgique comme en Allemagne ou en Italie, à l’inverse, rien n’a été décidé. J’espère donc que les différents gouvernements européens suivront de façon à ce qu’on puisse quand même travailler et développer notre activité sans quoi, il sera extrêmement compliqué de se relever. Ce sera de toute façon difficile car beaucoup sont désormais frileux et ont peur de sortir de chez eux. Les exposants comme les partenaires et les visiteurs devront faire preuve de beaucoup d’abnégation pour pouvoir reprendre une vie normale.

Est-ce une crainte pour vous de faire repartir l’activité, les foires et salons mais n’avoir peu ou pas de visiteurs ?
Evidemment, on se pose ce type de questions. Le public va-t-il répondre présent ? Pour le SX, je pense qu’il sera frileux même si ça dépend beaucoup des générations. Les plus jeunes seront peut-être là mais les plus anciens seront prudents. Le Supercross de Genève attire chaque année un public très large et il y a fort à penser que certains n’auraient pas pris le chemin du Palexpo en décembre si on avait maintenu l’événement.

Cette édition 2020 devait être la 35ème. Est-ce la 1ère année que le SX de Genève n’a pas lieu depuis sa création ?
Je crois, oui. Il a eu lieu une année ailleurs qu’au Palexpo mais il a bien eu lieu contrairement à 2020. C’est donc bel et bien une première.

Même si répondre à cette question est un peu prématuré, peut-on malgré tout espérer une belle « revanche » en 2021 ?
Il faut rester positif et vivre au jour le jour. Quand Jean Castex conseille de ne plus aller en Espagne, je vous laisse imaginer ce que les hôteliers espagnols en pensent. A l’inverse, il décide de ré-autoriser les foires et salons en septembre. Chaque jour amène son lot de nouvelles, bonnes et moins bonnes avec lesquelles il faut tenter de se frayer un chemin. C’est à nous d’appréhender cette nouvelle manière de vivre. L’avenir nous dira le reste.

Propos recueillis par Justine Geisler.

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